
En ce Mois national de l’histoire autochtone, PPE est honoré de mettre en lumière un papa engagé aux racines autochtones profondes : Gaetan Baillargeon. Père de deux enfants – un garçon et une fille – qui fréquentent des écoles du Conseil scolaire catholique des Grandes Rivières (CSCDGR) et du Conseil scolaire public du Nord-Est de l’Ontario (CSPNE), Gaetan est un modèle d’engagement communautaire et de résilience.
Originaire de la communauté de Constance Lake First Nation, où il a grandi jusqu’à 16 ans, il s’est ensuite installé à Hearst. Son parcours professionnel est riche et inspirant : massothérapie, kinésiologie, orthothérapie, développement économique, foresterie, liaison autochtone ainsi que secteurs minier et d’exploration. Aujourd’hui, il est directeur de l’éducation pour Constance Lake Education Authority, un poste qu’il souhaite occuper jusqu’à la fin de sa carrière.
Conseiller municipal à Hearst depuis 2018, Gaetan s’est illustré en refusant de prêter allégeance à la Couronne, en raison de ses valeurs en tant que personne autochtone. Ce geste, profondément ancré dans son vécu et dans l’histoire de sa famille – sa mère ayant fréquenté les pensionnats –, a mené la province à offrir une déclaration alternative pour permettre aux élus autochtones de siéger, tout en restant fidèles à leurs principes.
Gaetan est un merveilleux exemple d’un leader calme, réfléchi et résolument ancré dans ses valeurs.
Nous sommes deux groupes minoritaires et je crois sincèrement que, si on travaillait ensemble, on serait beaucoup plus forts.
Gaetan Baillargeon
De quelle façon êtes-vous un parent engagé?
Pour moi, l’engagement parental prend racine dans le désir profond de bâtir des ponts entre les cultures, les générations et les systèmes en place. En tant que parent autochtone vivant dans le Nord, je considère qu’il est essentiel de participer activement à la réconciliation, notamment en collaborant avec les conseils scolaires et en invitant des membres de la communauté à prendre part à des initiatives éducatives. C’est ma manière de faire entendre nos voix et de rappeler que nous sommes présents, impliqués et investis dans la réussite de nos enfants.
Je n’ai pas grandi avec des parents qui s’impliquaient dans les écoles. Mon père travaillait beaucoup et ma mère, qui ne parlait pas français et qui avait vécu les pensionnats, avait une peur bien réelle du système scolaire. Cette absence de participation m’a toujours marqué, et c’est ce qui me pousse aujourd’hui à être là pour mes enfants, chaque fois que c’est possible. Que ce soit pour des activités comme le Festival HOREM à Hearst, les sorties à la piscine ou les événements scolaires, je fais de mon mieux pour être présent. Mon emploi me permet heureusement une certaine flexibilité, et je choisis d’en profiter pour être à la maison les fins de semaine et pour soutenir mes enfants dans leurs expériences scolaires et sociales.
Mon engagement, ce n’est pas une lutte contre le gouvernement, mais plutôt une affirmation que nous avons une voix. Tout le monde n’a pas la chance ou les moyens de la faire entendre – je le reconnais. Alors, tant que je le peux, je veux être un exemple pour mes enfants, leur montrer que leur père est toujours prêt à se lever pour leurs droits, pour ceux de notre communauté et pour une éducation qui reflète nos réalités et nos valeurs.
Quelles sont les raisons qui motivent votre engagement?
Ce qui me motive d’abord, ce sont mes enfants. Je veux qu’ils grandissent en voyant que leur père fait les choses avec cœur, pas seulement pour recevoir un chèque de paie, mais parce qu’il croit profondément à la valeur de son travail. Je veux qu’ils comprennent que, lorsqu’on s’investit avec conviction, on peut réellement avoir un impact – pas seulement dans notre propre vie, mais aussi dans celle de notre communauté et sur la transmission de nos racines.
J’ai grandi dans une famille où les moyens étaient limités. J’ai vu mon père se lever tous les matins à 5 h pour aller travailler fort. Je viens d’un milieu où il n’y avait pas beaucoup d’argent et ça laisse des traces. Aujourd’hui, mon objectif est de faire en sorte que mes enfants n’aient pas à vivre les mêmes difficultés. Mais, plus encore, je veux qu’ils sachent qui ils sont, qu’ils comprennent ce que ça veut dire être Autochtone, ce que ça veut dire être francophone. Ce sont deux identités fortes qui, pour moi, méritent d’être célébrées ensemble.
J’essaie, à mon échelle, de rapprocher ces deux communautés. Je crois que nous avons énormément à apprendre les un(e)s des autres, et mon engagement vise justement à créer des espaces où ces échanges peuvent avoir lieu – pour mes enfants, pour les jeunes, pour les générations futures.
Quels conseils souhaitez-vous donner aux parents de votre communauté?
Mon plus grand conseil, c’est de sortir, de participer. Allez aux événements, que ce soit ceux organisés par la communauté autochtone ou par la communauté francophone. Trop souvent, je vois un manque de participation croisée. Les activités ont lieu, mais on ne se mélange pas assez. Pourtant, ce sont des occasions précieuses de bâtir des ponts, de mieux se comprendre et de se soutenir mutuellement.
Quand je regarde par exemple ce qui se passe avec l’équipe des Lumberjacks dans la communauté de Hearst, dès qu’il est question de hockey, tout le monde se rassemble, peu importent les origines. Ça montre que c’est possible. Et c’est cette même énergie qu’on devrait canaliser dans d’autres aspects de la vie communautaire.
Nous sommes deux groupes minoritaires et je crois sincèrement que, si on travaillait ensemble, on serait beaucoup plus forts. Il y a parfois une certaine crainte d’aller sur la réserve, mais il n’y a aucun risque à venir à notre rencontre. Beaucoup de gens de Hearst aiment déjà aller au bingo ou aux tournois de pêche organisés à Constance Lake. Ce sont de petits gestes, mais ils montrent qu’un rapprochement est en cours. Il faut simplement continuer dans cette direction, avec ouverture et curiosité.
En tant que parent engagé, quel geste ou conseil aimeriez-vous partager avec d’autres familles pour mieux honorer les cultures et les savoirs autochtones, ce mois-ci et tout au long de l’année?
Le plus grand geste qu’on peut poser, c’est de s’ouvrir avec sincérité à la culture autochtone, pas seulement pendant une journée ou un mois. Porter un gilet orange, c’est bien, mais ce n’est pas suffisant. La vraie réconciliation, elle passe par la connaissance, par la volonté de comprendre. Je dirais aux familles : prenez le temps de faire vos propres recherches, d’apprendre l’histoire du Canada telle qu’elle a réellement été vécue par les peuples autochtones. Ce qu’on nous a enseigné à l’école n’était pas toujours la vérité. Les temps ont changé et il faut aller plus loin.
Je vous encourage à participer à des événements, à assister à des pow-wow, à visiter les communautés autochtones, à aller à la rencontre des gens. C’est dans ces échanges qu’on grandit. N’ayez pas peur de poser des questions. Souvent, ce sont les gens eux-mêmes qui sont les meilleures sources de savoir. Ils ont des histoires à partager, des expériences qui peuvent toucher et faire réfléchir.
Finalement, le plus beau geste de réconciliation, selon moi, c’est de s’éduquer soi-même et de transmettre cette ouverture à nos enfants, pour bâtir ensemble un avenir plus juste, enraciné dans le respect et la vérité.